Rapt à St Tracy
Chapitre 3


Pendant que Gladys, Clément et Freesby, l'épagneul breton, débutaient leur enquête et se trouvaient chez M. et Mme Leduc, les parents de Clément étaient en train de boire le café chez les Leblanc. M. et Mme Lenoir venaient en effet d'emménager dans le quartier mal famé de Saint Tracy de la Chicane et voulaient faire plus ample connaissance avec leurs voisins.
Lorsque la police arriva et demanda aux Leblanc de se rendre, ces derniers furent totalement stupéfaits.
- Il doit y avoir une erreur, nous n'avons rien à nous reprocher, des témoins sont même là pour le confirmer.
- Vous vous moquez de nous, une fillette a été enlevée et on vient de retrouver son vélo dans votre jardin !
À ce moment là, les Lenoir, intrigués par le ton de la discussion, sortirent pour dire aux policiers :
- Cela fait deux heures que nous sommes ici à discuter, à faire connaissance et nous pouvons vous assurer que M. et Mme Leblanc ne sont pas sortis de chez eux.
- Dans ce cas, comment pouvez-vous expliquer la présence de ce vélo ?
À cet instant, Alice, la fille unique des Leblanc, descendit les escaliers en courant et commença à expliquer à la police :
- Je suis toujours la dernière à sortir de l'école et, en rentrant à la maison, j'ai remarqué le vélo d'Ingrid dans la rue. Je l'ai tout de suite reconnu car mon amie est la seule de l'école à avoir un vélo de cette couleur. J'ai alors pensé qu'elle était tombée en se faisant vraiment mal et qu'elle n'avait donc pas pu le reprendre. Je l'ai donc ramené à la maison en me disant que je le lui rendrai demain matin.
Les policiers étaient totalement confus et s'excusèrent auprès des Leblanc de les avoir trop rapidement suspectés. Ils repartirent au commissariat pour poursuivre leur enquête qui s'annonçait plus compliquée que prévu.
Arrivés au poste de police, ils tombèrent sur M. et Mme Leduc. Ces derniers, après s'être disputés comme des gamins, s'étaient dit qu'il fallait aller porter plainte.
- Bonsoir, nous sommes venus déclarer le vol de notre voiture. C'est une Jaguar de couleur noire, avec le volant à droite, la porte avant gauche abîmée et deux pots d'échappement. " Philippe Leduc en avait fini avec sa description.
Un policier s'énerva :
- Vous venez porter plainte pour le vol d'une voiture qui ressemble étrangement à celle impliquée dans la disparition d'une petite fille, Ingrid Leriche. Je ne crois pas à votre histoire.
- Vous croyez que moi, un grand avocat réputé, j'aurais pu faire une chose aussi horrible ? s'indigna M. Leduc.
Quelques minutes plus tard, un autre policier arriva avec une photo à la main. Celle-ci provenait d'un radar placé entre la fin du quartier résidentiel de Saint Tracy de la Chicane et l'entrée de la forêt.
Les policiers étudièrent la photo et virent plusieurs personnes à l'intérieur de la Jaguar. Les gendarmes dévisagèrent M. Leduc et le comparèrent avec les personnes à bord du véhicule. Malheureusement, on ne distinguait précisément que le conducteur. Celui-ci avait un piercing à l'arcade sourcilière droite, des cheveux longs, et de petites lunettes carrées sur un visage joufflu ; tandis que M. Leduc était grand, maigre et avait des cheveux très courts.
- Vous voyez bien que ce n'est pas moi, rétorqua Philippe Leduc.
- Cette photo ne vous innocente pas complètement car vous auriez très bien pu vous trouver sur la banquette arrière du véhicule.
Mme Leduc, voulant défendre son mari, demanda l'heure à laquelle avait été pris le cliché. Un policier lui répondit que la voiture avait été flashée à 17h12 précises. Les enquêteurs firent comprendre à M. Leduc que cet horaire ne le disculpait absolument pas.
- Je peux vous assurer qu'à cette heure-ci, nous étions tous les deux chez nous, en train de nous disputer au sujet de la disparition de notre voiture. Vous pouvez même demander à notre petit voisin, Clément Lenoir, de vous confirmer ce que je vous dis.
Un policier appela chez les Lenoir, et, peu de temps après, Clément et Gladys se trouvèrent au commissariat. Ceux-ci confirmèrent les propos de M. Leduc.
Voyant que les deux enfants connaissaient bien Ingrid et avaient déjà commencé leur enquête, les policiers leur proposèrent d'élucider ensemble cette affaire. C'est avec joie que Gladys et Clément acceptèrent.
Les enquêteurs se répartirent les tâches de la façon suivante : Clément, accompagné de son chien et de deux policiers, alla interroger les parents d'Ingrid, tandis que Gladys, en compagnie d'un policier, partit à la recherche du témoin.
En arrivant devant la maison des Leriche, le groupe de Clément fut impressionné par la beauté de la bâtisse. Celle-ci, comportant deux étages, était entourée d'un superbe jardin tapissé de fleurs. Carole Leriche reçut les enquêteurs dans l'immense salon de la maison. M. et Mme Leriche étaient totalement bouleversés par la disparition de leur fille.
Clément demanda :
- Avez-vous reçu une demande de rançon de la part des ravisseurs de votre fille ?
- Non ! répondit M. Leriche de façon si précipitée que les policiers doutèrent de sa sincérité. Clément poursuivit son interrogatoire :
- Voyez-vous quelqu'un qui pourrait vous en vouloir au point d'enlever votre fille ?
M. Leriche fit semblant de réfléchir un instant et dit qu'il ne se connaissait aucun ennemi. Les enquêteurs repartirent avec très peu d'informations mais un gros doute quant à l'honnêteté des Leriche.
Pendant ce temps là, Gladys accompagna le policier jusqu'à la petite maison du témoin. Ce dernier, prénommé Albert, était un homme âgé qui portait un pantalon de velours ainsi qu'une chemise à carreaux. Sa maison était vieille et sombre. Le policier prit la parole :
- Ma jeune équipière m'a raconté que vous aviez assisté à la scène du rapt d'une fillette. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Albert conduisit alors les deux enquêteurs dans une petite pièce qui sentait le moisi et qui lui servait de salon.
Le vieil homme répéta ce que Gladys savait déjà : au moment où la fillette rentrait de l'école à bicyclette, une Jaguar noire est passée, s'est arrêtée, deux malfaiteurs ont bondi, ont attrapé et ligoté la fillette puis sont partis en trombe.
Les deux enquêteurs voulurent en savoir plus sur les kidnappeurs. Albert resta silencieux un moment, mais Gladys et son collègue étaient persuadés que le vieil homme cachait quelque chose. Gladys l'implora :
- Je vous en supplie, vous êtes le seul qui puisse nous aider à sauver mon amie.
Devant le chagrin de la jeune fille, Albert se décida à parler :
- Si j'hésite à vous en dire un peu plus sur les malfaiteurs, c'est parce que ma vue décline de plus en plus et je ne voudrais pas accuser à tort des innocents. Cependant, il semblerait que les deux personnes que j'ai pu apercevoir me rappellent étrangement des braqueurs de banque qui ont fait la une des journaux il y a peu de temps, à leur sortie de prison.